Tout chez Henri Rivière est une question d’âme. Celle de la Bretagne – lever de lune ou jeu sur les rochers, voiles en partance et vieux marins l’œil vers le large – ; celle des lieux sans âge et des campagnes habitées où les saisons se résolvent clairement ; celle si bien rendue des bords de Seine où la mélancolie se cristallise ; l’âme des hommes enfin que ne condamnerait aucune moderne métamorphose. Avec, aux détours du chemin, la vision calme d’un paradis perdu.
La question de la beauté est inséparable de celle de la conscience. L’une comme l’autre requièrent équilibre et méditation sur le temps. Ainsi des lithographies d’Henri Rivière, dont les effets atmosphériques, les jeux de couleurs et de lumières, reflètent une exigence d’ordre moral. Ce formalisme dans le traitement des aspects de la nature offre autant de contrepoints presque musicaux. La précision du trait, acquise en animant de 1886 à 1897 le Théâtre d’ombres du cabaret du Chat noir, traduit cette rigueur teintée d’ascèse heureuse qui fait les œuvres harmonieuses.
En bon veilleur des Travaux et des Jours, Henri Rivière pénètre l’imaginaire par une féerie de derniers rayons, d’études de vagues, de brume, de vent, d’orage qui monte sur des falaises hiératiques, de nuits en mer. L’œil du peintre semble le point pivot autour duquel le paysage se déploie. Parfois la lumière est si retenue que le silence infuse des transparences et en devient palpable.
Cœur battant du paysage, Henri Rivière sait s’effacer, et c’est comme pénétrer d’un coup dans une paix spirituelle, une liturgie de la nature, où l’homme trouve sa place, celle que la dignité assigne au travail ou à la contemplation. Il serait difficile de ne pas prêter à une telle œuvre le sens d’une réflexion sur la présence au monde et sur l’histoire des hommes. Et ne dirait-on pas que les personnages n’ont été dessinés et disposés si nettement que parce qu’il s’agissait de les garder contre leur effacement.
Les paysages parisiens sont de la même eau : architectures fidèles, perspectives découpées, même souci de netteté et même désir de respiration dans ses représentations urbaines. Cette fois, le propos se double d’une quasi-absence : ouverture sur un quai où s’affairent quelques débardeurs, ou noble permanence d’un clocher. Pour les vues de Notre-Dame, de la Tour Eiffel ou du Montmartre de 1900, le peintre s’est placé au meilleur des endroits, celui des hauteurs.
Tout chez Henri Rivière est une question d’âme. Celle de la Bretagne – lever de lune ou jeu sur les rochers, voiles en partance et vieux marins l’œil vers le large – ; celle des lieux sans âge et des campagnes habitées où les saisons se résolvent clairement ; celle si bien rendue des bords de Seine où la mélancolie se cristallise ; l’âme des hommes enfin que ne condamnerait aucune moderne métamorphose. Avec, aux détours du chemin, la vision calme d’un paradis perdu.
La Galerie Saphir présente à Paris jusqu’au 31 juillet 2023, une sélection de lithographies sur la Bretagne et sur Paris tirées des séries : Les Aspects de la Nature, le Beau pays de Bretagne, la Féerie des heures, Au Vent de noroît et Les Paysages parisiens.
un été avec henri rivière
Du 12 au 31 JUILLET 2023